Suis-moi

Cette suite de messages est tirée d’une méditation du frère Henri Rossier, serviteur du Seigneur, parue dans le Messager Evangélique de 1888, et intitulée :

« Simon Pierre »

Accès aux différents chapitres:

Avant-propos

Chapitre 1 - «Je suis un homme pécheur »

Chapitre 2 - Pierre marchant sur les eaux

Chapitre 3 - La connaissance personnelle de Christ

Chapitre 4 - Venir après lui

Chapitre 5 - Le contempler dans la gloire

Chapitre 6 - La maison du Père

Chapitre 7 - La relation avec le Fils

Chapitre 8 - Sacrificature et communion

Chapitre 9 - Pierre entre en tentation

Chapitre 10 - Le sépulcre

Chapitre 11 - Le service

Chapitre 12 - L'âme restaurée

Chapitre 13 - Suis-moi


 

Chapitre 13 - Suis-moi

 

En vérité, en vérité, je te dis : Quand tu étais jeune, tu te ceignais, et tu allais où tu voulais ; mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains, et un autre te ceindra, et te conduira où tu ne veux pas. Or il dit cela pour indiquer de quelle mort il glorifierait Dieu. Et quand il eut dit cela, il lui dit : Suis-moi. (Jean 21 v.18-19)

 

Pierre, confiant en lui-même, avait dit : « Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller en prison et à la mort » (Luc 22 v.33). L'âme du disciple ayant été brisée, le Seigneur peut l'instruire : « En vérité, en vérité, je te dis : Quand tu étais jeune, tu te ceignais, et tu allais où tu voulais ».

NB. Voici une petite remarque importante sur l’expression « tu te ceignais », « se ceindre » veut dire porter une ceinture, ou autre élément, autour des reins, afin d’avoir de la force. On trouve dans l’Ecriture trois situation où le port d’une ceinture est absolument nécessaire :

1.    Pour la marche : parlant de l’agneau pascal, juste avant de se mettre en route pour quitter l’Egypte : « vous le mangerez ainsi : vos reins ceints, vos sandales à vos pieds, et votre bâton en votre main ; et vous le mangerez à la hâte. C’est la pâque de l’Éternel. » (Exode 12 v.11)

2.    Pour le service : le Seigneur nous enseigne en rapport avec service en attendant son retour : « Que vos reins soient ceints et vos lampes allumées » (Luc 12 v.35), sans manquer de rappeler le service que le Seigneur fait lui-même : « En vérité, je vous dis qu’il [le maître] se ceindra et les fera mettre à table, et, s’avançant, il les servira. » (Luc 12 v.37)

3.    Pour le combat : l’apôtre Paul nous exhorte à revêtir « l’armure complète de Dieu, afin que vous puissiez tenir ferme contre les artifices du diable : car notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les autorités, contre les dominateurs de ces ténèbres, contre la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes. » (Ephésiens 6 v.11-12). Cette armure contient une pièce importante qui est justement la ceinture : « Tenez donc ferme, ayant ceint vos reins de la vérité, … » (Ephésiens 6 v.14)

Au commencement de sa carrière, il disposait, pour ainsi dire, de sa propre force, sa propre ceinture, qui fortifiait les reins ; la confiance en lui-même en était le résultat. Il allait où il voulait et marchait ainsi dans l'indépendance. « Mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains, et un autre te ceindra, et te conduira où tu ne veux pas ». A la fin de sa carrière, quand la vieillesse aurait abattu sa force naturelle, il dépendrait d'autrui pour sa force et devrait consentir à être guidé par d'autres qui le mèneraient où sa volonté ne l'aurait jamais conduit. Pierre avait dit : « En prison et à la mort ». La chose aurait lieu, mais nullement avec les forces de l'homme ; elle se réaliserait au milieu de la faiblesse du vieillard. « Or il dit cela pour indiquer de quelle mort il glorifierait Dieu ». Dieu serait glorifié dans ce brisement complet de l'homme, alors que vieux, faible, et conduit par d'autres contre son gré, il semblerait être devenu un instrument inutile.

Comme nous jugeons mal d'habitude ce qui convient à Dieu et ce qui l'honore ! Quand, frappés dans nos corps, dans notre intelligence peut-être, nous sommes mis au rebut par les hommes, quand, sentant notre inutilité, nous serions tentés de dire comme le monde, que nous ne sommes plus bons à rien, Dieu déclare que nous lui sommes utiles.

Jusqu'ici le disciple, avec toute son énergie, avait plus déshonoré que glorifié le Seigneur. Maintenant l'homme va vieillir, s'affaiblir, mourir, et devant sa mort Dieu dit : Voilà ce qui me glorifie. C'est que cette gloire n'est réalisée que dans des vases brisés, dépendants, et n'ayant pour force que celle de Dieu.

C'est alors que Jésus dit : « Suis-moi ». Il répond à la parole prononcée jadis par Pierre: « Pourquoi ne puis-je pas te suivre maintenant ? » (Jean 13 v.37). Désormais il va pouvoir le suivre.

Pierre se retourne et voit suivre Jean, « le disciple que Jésus aimait, qui aussi, durant le souper, s'était penché sur sa poitrine, et avait dit : Seigneur, lequel est celui qui te livrera ? » (verset 20).

Trois choses caractérisent ici le disciple bien-aimé :

1.    Il était l'objet de l'amour de Christ et en avait conscience,

2.    il avait confiance en Christ seul, et

3.    son attitude pendant le souper montrait qu'il avait une intimité de communion avec le Maître, que d'autres ne possédaient pas.

Aucun motif n'est plus simple pour suivre Jésus, que celui-ci : son amour, qui nous est connu, nous attire après lui, cet amour gagne naturellement notre confiance et nous met en communion avec le Seigneur.

Il était donné à Pierre de suivre maintenant le Seigneur pas à pas, à travers la mort. Les expériences de lui-même, avant d'être « revenu » (Luc 22 v.32), étaient désormais terminées ; il avait perdu confiance en lui, gagné confiance en Christ, et il entrait maintenant dans le chemin béni où il allait apprendre à réaliser la dépendance jusqu'à la mort. Je dis : « allait apprendre », car cette dépendance ne s'apprend pas d'un seul coup et en une fois, quelle que soit la profondeur du travail opéré dans l'âme. « Quand tu seras devenu vieux », dit le Seigneur ; Pierre avait à être éprouvé jusqu'à la mort et , comme pour son Maître, se trouverait le couronnement d'une vie appelée à glorifier Dieu.

Jean a une autre mission : il ne lui est pas donné de suivre le chemin de Christ dans la mort violente, mais de demeurer figurativement jusqu'à ce que le Seigneur vienne, assistant au déclin et à la ruine de l'Eglise et, en rapport avec elle, à cette puissante venue du Seigneur, dont les disciples avaient vu le tableau sur la sainte montagne en rapport avec le royaume. Mais Jean suit aussi le Seigneur. Il n'avait pas besoin, comme Pierre, d'un ordre ou d'un encouragement pour le suivre ; l'amour du Seigneur l'attirait après lui.

En suivant le Seigneur, Pierre n'a pas à s'occuper des autres. « Que t'importe ? Toi, suis-moi ». Du moment qu'on se retourne, on cesse de suivre et l'on s'arrête. La chose est sérieuse. Pour le suivre, il faut unité de pensée et l'œil simple. Pierre ne pouvait être occupé à la fois de Jean et de Christ.

Pour bien suivre le Seigneur, il faut qu'il se soit emparé si puissamment de nous que nous ne nous appartenions plus. C'est là le seul moyen du renoncement à nous-mêmes, le seul moyen de porter courageusement notre croix ; nous estimons que Jésus seul vaut la peine d'être suivi ici-bas, même au prix d'une vie de souffrances.

Les disciples l'ont suivi de deux manières : avant et après la croix.

Au premier chapitre de Jean, Jésus dit à Philippe : « Suis-moi », au dernier chapitre, il dit à Pierre : « Suis-moi ».

Dans le premier cas, avant la croix, les disciples avaient tout abandonné pour le suivre, car ils avaient foi en lui, mais leur marche s'arrêta devant le Calvaire, et ils s'enfuirent tous. Pierre persista le dernier, et le suivit de loin ; nous avons vu où cela aboutit.

Au delà de la croix, le chemin interrompu recommence, mais les disciples suivent désormais un Christ ressuscité, céleste, qui imprime son caractère à leur marche. Cette marche devient céleste.

Avant la croix, bien qu'avec d'autres motifs et d'autres sentiments que les disciples, les foules pouvaient le suivre ; après la croix, le monde ne le peut plus, car il faut pour cela la fin du vieil homme et la puissance de l'Esprit, deux choses trouvées par le croyant seul, dans la mort et la résurrection de Christ.

Que Dieu nous donne une intensité soutenue et toujours croissante d'énergie spirituelle pour le suivre. En suivant le Seigneur, lui qui « nous a laissé un modèle afin que nous suivions ses traces » (1 Pierre 2 v.21), nous deviendrons des modèles pour d'autres. Notre immense privilège est de posséder en lui l'homme modèle marchant ici-bas dans une perfection absolue, et l'homme modèle sanctifié dans le ciel pour nous ; mais en le suivant, je le répète, nous pouvons devenir nous-mêmes des modèles pour nos frères.

L'apôtre Paul disait: « Soyez tous ensemble mes imitateurs, frères, et portez vos regards sur ceux qui marchent ainsi, suivant le modèle que vous avez en nous » (Philippiens 3 v.17). Paul ne se donnait pas comme modèle devant être suivi, ce qui aurait été se substituer à Jésus, mais il offrait l'exemple d'un homme qui, n'ayant pour objet que cette personne bénie, s'était mis à la suivre ici-bas et courait vers elle, l'ayant pour but dans la gloire. Ainsi la personnalité de Paul ne cachait pas le Seigneur à ses frères, mais, bien au contraire, le mettait en pleine lumière comme le seul objet digne d'être suivi, digne d'être atteint !